Hyperprésidentialisation

Projet de constitution du Gabon : Quels seront les nombreux pouvoirs du président de la République ?

Projet de constitution du Gabon : Quels seront les nombreux pouvoirs du président de la République ?
Projet de constitution du Gabon : Quels seront les nombreux pouvoirs du président de la République ? © 2024 D.R./Info241

Le projet de constitution soumis au référendum du 16 novembre 2024 au Gabon propose des réformes profondes dans l’organisation des pouvoirs du président de la République. Ce texte, qui met fin aux fonctions de Premier ministre, remplacé par un vice-président du gouvernement sans réel pouvoir, et instaure un gouvernement qui ne sera plus responsable que devant le président de la République, signe une hyperprésidentialisation du pouvoir exécutif. Le président conservera également le droit de dissoudre le Parlement une fois par mandat, tout en demeurant à la tête du Conseil supérieur de la magistrature.

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Ainsi, le président de la République reste le garant de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale du Gabon. Selon l’article 9 du projet, « le président de la République est le chef de l’État, garant de la Constitution, de l’indépendance nationale, de l’intégrité territoriale et du respect des traités et accords internationaux  ». Ce rôle est également élargi pour inclure un accent particulier sur la défense de la démocratie et l’amélioration de la gouvernance, deux piliers essentiels du nouveau texte.

Rallongement du mandat présidentiel et pouvoirs gouvernementaux

Le projet fait passer la durée du mandat présidentiel de 5 à 7 ans, mais impose désormais une limitation stricte à deux mandats successifs. Ainsi, l’article 43 précise : « Le président de la République est élu pour un mandat de sept ans, renouvelable une fois. Nul ne peut exercer plus de deux mandats successifs, même en cas de révision constitutionnelle ». Cette mesure, qui avait longtemps été réclamée par une partie de l’opinion publique, vise à renforcer l’alternance démocratique et à prévenir les dérives liées à une présidence à long terme.

De plus, le président de la République sera désormais le chef du gouvernement, mettant fin à la fonction de Premier ministre, selon l’article 69. À la place, le président sera assisté d’un vice-président du gouvernement, chargé uniquement de la coordination gouvernementale. Seul le président nommera les membres du gouvernement et définira leurs attributions. Ces membres du gouvernement ne seront responsables qu’exclusivement devant le président de la République, et non plus devant les parlementaires, qui seront réduits à débattre uniquement des propositions de textes soumis à leur attention.

Roi des nominations

Par ailleurs, la nomination aux principaux emplois civils et militaires, qui relève toujours des prérogatives présidentielles, se voit désormais soumise à des contrôles plus rigoureux. L’article 53 stipule que «  le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l’État, sous réserve de l’avis des présidents des deux Chambres du Parlement ». Cette disposition vise à garantir une plus grande transparence et à éviter que les nominations ne soient uniquement le fait du pouvoir exécutif.

Le texte prévoit également des ajustements importants concernant la vacance du pouvoir. En cas d’empêchement temporaire du président, le vice-président, nommé par le président lui-même, assure l’intérim. Cependant, l’article 54 introduit des mécanismes de remplacement plus clairs en cas de vacance définitive : « En cas de vacance définitive, le président du Sénat assure l’intérim jusqu’à l’organisation d’une nouvelle élection présidentielle dans un délai de 60 jours  ». Cette disposition permet d’éviter tout vide institutionnel pouvant engendrer une crise politique.

Dissolution de l’Assemblée nationale encadrée

L’une des innovations majeures du projet est l’encadrement du pouvoir présidentiel de dissolution de l’Assemblée nationale. L’article 55 mentionne : « Le président de la République peut dissoudre l’Assemblée nationale après consultation du président du Sénat et du président de la Cour constitutionnelle ». Cette prérogative, bien qu’elle soit maintenue, est soumise à des limites : elle ne peut être exercée qu’une seule fois par mandat présidentiel. Cette restriction vise à prévenir toute utilisation abusive de ce pouvoir pour fragiliser le Parlement.

Le recours aux pouvoirs exceptionnels, tels que la proclamation de l’état d’urgence ou de l’état de siège, est également soumis à des règles strictes. L’article 56 précise : « Le président de la République peut proclamer l’état d’urgence ou l’état de siège après consultation des présidents des deux Chambres et du président de la Cour constitutionnelle. La prorogation de cet état au-delà de quinze jours nécessite l’accord du Parlement  ». Ce dispositif renforce ainsi le rôle du Parlement dans les décisions touchant aux libertés fondamentales et à l’ordre public.

D’autres verrous

Le président conserve par ailleurs le pouvoir de soumettre certaines questions d’importance nationale à un référendum. L’article 57 prévoit que « le président de la République peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, des réformes relatives à la politique économique ou sociale ou tout autre projet ayant une incidence sur les principes constitutionnels  ». Cela ouvre la possibilité de consulter directement les citoyens sur des sujets essentiels à la vie publique.

En termes de redevabilité, le projet de constitution introduit également des obligations de consultation régulière du Parlement et de la Cour constitutionnelle avant toute décision engageant l’État dans des alliances ou accords internationaux majeurs. Ce renforcement du contrôle parlementaire traduit une volonté de limiter le pouvoir discrétionnaire du président en matière de politique extérieure.

Les dispositions relatives à l’immunité présidentielle sont également modifiées. L’article 58 précise que « le président de la République ne peut être poursuivi pendant l’exercice de son mandat pour les actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions ». Toutefois, cette immunité est levée à la fin de son mandat pour les faits qualifiés de haute trahison. Cela permet de renforcer la responsabilité politique et pénale du chef de l’État.

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