Torturé par des gendarmes gabonais, un père de famille retrouvé mort dans les locaux de la DGR
Jean Claude Mbayi, un agent municipal entendu dans une affaire de crime rituel présumé, est mort après avoir été torturé par des éléments de la Direction générale des Recherches (DGR - dépendant directement de la Présidence du Gabon) de l’antenne de Franceville au Gabon. Une bavure policière presque passée sous silence qui interpelle sur les méthodes de travail des forces de sécurité du Gabon lors d’enquête.
Bavure mortelle. C’est une bien sordide affaire doublée d’un drame qui s’est déroulée à Franceville, capitale de la province du Haut-Ogooué (nord-est du Gabon) dimanche dernier. Jean Claude Mbayi, agent municipal dans la ville de Léconi, la quarantaine et père de 5 enfants a trouvé la mort sous la torture dans les locaux de l’antenne de la Direction générale des Recherches (DGR). Cité dans une affaire disparition, Jean Claude Mbayi avait été arrêté à Leconi trois jours plus tôt dans la nuit du 17 au 18 Juin alors qu’il rentrait d’un voyage au Congo voisin.
« L’affaire Ngabou »
Alors que Jean Claude Mbayi se trouve au Congo Brazzaville, la disparition d’un homme plonge la petite localité de Léconi dans la stupeur. Un homme dénommé Kaloulou dit Ngambou, septuagénaire, surveillant retraité au CES Kakogho de Léconi, est porté disparu alors qu’il était allé pêcher à la rivière Ngouya. Alertés par les proches du disparu, les gendarmes de la brigade de Léconi commencent à enquêter et très vite ils vont retrouver près de la rivière Ngouya des indices qui leur permettent de penser que le disparu a été enlevé et certainement victime d’un « crime rituel », un sacrifice humain censé apporter richesse et puissance à son commanditaire.
Les nombreuses traces de torture retrouvées sur la victime des gendarmes gabonais
La ville est en émoi et une foule en colère entend obtenir la vérité et exige que le corps du disparu soit rendu à sa famille. Les gendarmes procèdent à des arrestations de suspects qui sont interrogés. L’un des suspects arrêtés désigne Jean Claude Mbayi - qui se trouve au Congo - comme mêlé à l’affaire.
Les derniers jours de Jean Claude Mbayi
De retour de son voyage du Congo, Jean Claude Mbayi, est arrêté dans la nuit du mercredi 17 au jeudi 18 juillet 2019 par les gendarmes de Léconi. Conduit peu après à Bongoville, Jean Claude Mbayi est finalement transféré à l’antenne de la DGR à Franceville le 20 juillet 2019. Informés de la présence de leur proche dans les locaux de la Direction générale des Recherches de Franceville, les proches de Jean Claude Mbayi vont se rendre dans la capitale du Haut-Ogooué, le dimanche.
Arrivés dans les locaux de la DGR à 9h, ils demandent à voir Jean Claude Mbayi qu’ils croient en garde à vue. Une fin de non-recevoir leur est opposée par les gendarmes d’élite qui leur font savoir que les visites ne sont pas autorisées. Les gendarmes les invitent à laisser leurs coordonnées pour être rappelés dès qu’il sera possible de voir Jean Claude Mbayi. Deux heures plus tard, à 11h, l’une des proches est invité à se rendre à la Direction Générale des recherches. Une fois sur place, elle y trouve le procureur de la République ainsi que des responsables de la gendarmerie et de la police et un corbillard de la société des pompes funèbres Altosep.
Mort sous la torture
Avec stupeur, les proches de Jean Claude Mbayi découvrent qu’il est décédé et qu’on s’apprête à acheminer son corps à la morgue. En discutant avec les autorités présentes, les proches de Jean Claude Mbayi apprennent qu’il est décédé dimanche 21 juillet à 4h du matin. Demandant à voir le corps, ils découvrent avec effroi qu’il a été atrocement supplicié. Sa dépouille est sanguinolente et tuméfiée. La vérité s’impose d’elle-même : Jean Claude Mbayi a été torturé à mort par les gendarmes de la DGR.
Jean Claude Mbayi : de suspect à macchabée
La torture est allègrement pratiquée au Gabon et ce n’est pas la première fois qu’un homme est torturé à mort à Franceville. En 2017, Bonssa Issufu soupçonné d’avoir commis un vol dans la maison dans laquelle il travaillait, avait été torturé à mort cette fois-ci dans les locaux de la police Judiciaire. Plus tard, on découvrait qu’il n’y était absolument pour rien. Rappelons que le Gabon a ratifié le 8 septembre 2000, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants.
De plus, selon l’article 1er de la Constitution gabonaise, "Nul ne peut être humilié, maltraité ou torturé, même lorsqu’il est en état d’arrestation ou d’emprisonnement" et que les articles 230 et 231 du Code Pénal énoncent respectivement que "Quiconque aura volontairement porté des coups ou fait des blessures ou commis toute autre violence ou voie de fait sur une personne sera puni d’un emprisonnement de deux mois à cinq ans". Et que "quand les violences ex-primées à l’article précédent auront été suivies de mutilation, amputation ou privation de l’usage d’un membre, cécité, perte d’un œil ou autre infirmité permanente, le coupable sera puni d’un emprisonnement de deux à dix ans".
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