Gabon : Fitch dégrade la note souveraine du pays à CCC en raison de tensions financières
Les nouvelles économiques ne sont guère reluisantes pour les autorités gabonaises. Moins de dix jours après l’éviction de l’ancien ministre de l’Economie Mays Mouissi, remplacé par Mark Alexandre Doumba, l’agence de notation américaine Fitch Ratings a dégradé ce vendredi 24 janvier la note du Gabon. La note souveraine de long terme en devises étrangères du pays passe à "CCC" contre "CCC+" précédemment. Cette décision reflète les pressions financières croissantes auxquelles le pays est confronté, marquées par des tensions sur les liquidités, des arriérés de paiements et une dépendance persistante aux recettes pétrolières.
Des tensions accrues sur les liquidités
Selon Fitch, le Gabon fait face à des contraintes majeures en matière de liquidité, exacerbées par un accès limité au marché régional de la dette et une accumulation d’arriérés. Entre janvier et novembre 2024, les arriérés envers les créanciers officiels, principalement bilatéraux, ont atteint près de 0,9 % du PIB. Ces retards de paiements ont également limité les possibilités d’obtenir des financements externes substantiels.
Principaux éléments liés à la dégradation de la note du Gabon par Fitch Ratings :
Aspect | Détails | Impact |
---|---|---|
Nouvelle note de Fitch | CCC | Réflecte des tensions accrues sur la liquidité |
Arriérés de paiement | 0,9 % du PIB envers les créanciers officiels en 2024 | Limite l’accès à de nouveaux financements |
Déficit budgétaire (2024) | 1,7 % du PIB | Creusement lié à la hausse des dépenses publiques |
Prévisions pétrole (2025) | 70 USD/baril | Baisse des recettes pétrolières, impact sur le budget |
Endettement prévu (2025) | 71 % du PIB | Augmentation des risques de défaut de paiement |
Échéances importantes (2025) | Eurobond de 315 millions USD | Défi majeur pour la trésorerie publique |
Dépendance aux revenus pétroliers | Forte dépendance aux hydrocarbures | Vulnérabilité face à la fluctuation des prix |
Appui potentiel du FMI | Discussions possibles en 2025 | Soumises à des réformes fiscales et budgétaires |
Recrutement dans le secteur public | Augmentation annuelle de la masse salariale de 7 % | Alourdit les dépenses publiques |
Réformes fiscales en cours | Introduction de la facturation numérique | Amélioration limitée des recettes fiscales |
Note ESG | Score faible (24e percentile pour la stabilité politique et les droits) | Réduction de la confiance des investisseurs |
Sur le plan local, la demande pour la dette publique a également diminué sur le marché de la CEMAC, particulièrement au cours du second semestre 2024. Malgré une levée de fonds équivalente à 2 % du PIB, la situation reste fragile, aggravée par les retards de paiement et des tensions régionales.
Des défis politiques et économiques majeurs
L’environnement politique du Gabon, marqué par la transition en cours depuis le renversement du régime d’Ali Bongo en 2023, contribue à l’instabilité. Fitch anticipe une éventuelle demande d’un programme avec le FMI en 2025, mais les négociations risquent d’être retardées jusqu’à l’élection présidentielle prévue en avril.
La nécessité de réformes drastiques pour stabiliser les finances publiques complique également les perspectives. Les mesures, bien que nécessaires, pourraient être impopulaires dans un climat politique encore volatil.
Dépendance au pétrole et déficit budgétaire
La dépendance du Gabon aux revenus pétroliers continue de peser sur son économie. Fitch prévoit une baisse des prix du pétrole à 70 USD par baril en 2025, aggravant le déficit budgétaire qui a atteint 1,7 % du PIB en 2024. Les pressions budgétaires devraient persister, avec un déficit prévu de 1,2 % du PIB en 2025.
Le relâchement fiscal observé depuis le changement de régime, marqué par une augmentation des dépenses publiques et une hausse de la masse salariale, contribue également à cette situation. Ces mesures, bien qu’elles répondent aux revendications sociales, alourdissent les finances publiques.
Un endettement préoccupant
Malgré une légère baisse de la dette publique en 2024, Fitch prévoit une remontée à 71 % du PIB en 2025, bien au-dessus de la médiane des pays de catégorie ’B’. Les pressions exercées par les remboursements de la dette externe et les arriérés domestiques accentuent les risques financiers du pays.
Les échéances à venir, notamment un eurobond de 315 millions USD en juin 2025, représentent un défi supplémentaire. Fitch note cependant que le Gabon a historiquement respecté ses engagements envers les investisseurs internationaux, un point positif dans un contexte autrement difficile.
Un avenir incertain malgré des atouts
Malgré ces défis, le Gabon conserve certains atouts, comme un PIB par habitant relativement élevé et des réformes fiscales en cours, telles que la facturation numérique obligatoire. Ces efforts pourraient renforcer les recettes fiscales non pétrolières, mais les bénéfices risquent d’être éclipsés par la baisse des revenus pétroliers et les pressions sociales.
L’évaluation de Fitch met en lumière les faiblesses structurelles persistantes de l’économie gabonaise et l’urgence de réformes. La capacité du pays à répondre à ces défis déterminera son avenir économique et financier dans les années à venir.
Enjeux pour l’avenir
Pour améliorer sa situation, le Gabon devra :
- Réduire ses arriérés afin de rétablir la confiance des créanciers internationaux.
- Diversifier ses revenus pour limiter sa dépendance au secteur pétrolier.
- Mettre en place des réformes structurelles dans le cadre d’un éventuel programme du FMI.
Cette dégradation de la note souveraine constitue un signal d’alarme pour le Gabon, soulignant l’urgence de réformes économiques et politiques pour rétablir la confiance des investisseurs et garantir une stabilité à long terme. Le scrutin présidentiel d’avril 2025 pourrait également influencer l’orientation des politiques économiques futures.
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