Le Parlement européen vote une résolution qui envisage des sanctions ciblées contre le régime d’Ali Bongo
Nouveau coup dur à l’international pour le régime d’Ali Bongo qui mène une dictature violente en privant la société civile et l’opposition gabonaise de leurs droits fondamentaux. Ainsi, la crise post-électorale du Gabon a été au programme de la séance plénière qui s’est tenue ce jeudi au Parlement européen de Strasbourg. En direct du siège européen, Info241 a assisté en exclusivité à l’adoption par la majorité des députés européens d’une résolution d’urgence portant sur la répression de l’opposition au Gabon (2017/2830(RSP) avec en filigrane un appel au Conseil de l’Europe à prendre des sanctions ciblées contre les autorités gabonaises coupables de la fraude électorale et des actes de violence qui ont découlé.
La stratégie diplomatique de Jean Ping et sa Coalition qui revendiquent toujours leur victoire à la présidentielle du 27 août 2016 est certes longue, toutefois, elle commence à faire germer lentement mais surement ses précieux fruits tant attendus. En effet, le peuple gabonais retient son souffle en misant son espoir autour de la crédibilité de l’Union européenne sur l’issue de la crise post-électorale. Dès lors, à l’occasion d’une séance plénière sur le Gabon, une résolution d’urgence a été approuvée ce jeudi au siège strasbourgeois du Parlement européen.
Cette résolution« invite notamment la Vice Présidente/Haut Représente, la Commission et les États membres à réexaminer leurs politiques à l’égard du Gabon et à envisager des sanctions ciblées à l’encontre des responsables de la fraude électorale et des actes de violence qui en ont découlé ; tout en réitérant son appel au gouvernement gabonais pour qu’il mette en place un système judiciaire et un régime de sanctions qui garantissent que les arrestations et les condamnations soient proportionnelles à la gravité des délits ; avant d’exhorter le gouvernement gabonais à apporter une réponse concrète aux inquiétudes de la communauté internationale, en organisant rapidement un forum consultatif pour un dialogue réellement ouvert à tous, transparent et impartial ; la résolution demande également à l’opposition d’évaluer la crédibilité de ce processus ».
De ce point de vue, les députés à travers le vote d’une résolution d’urgence du Parlement européen sur la répression de l’opposition au Gabon (2017/2830(RSP) ont « considéré que des allégations de trucage ont entaché l’élection présidentielle d’août 2016 au Gabon ; que, dans les jours qui ont suivi le scrutin, le Parlement gabonais a été incendié et que plusieurs manifestants ont été tués et des centaines d’autres arrêtés ; que, bien que la situation sur le plan de la sécurité se soit largement stabilisée, les tensions politiques et sociales, exacerbées par la piètre conjoncture économique, restent vives dans tout le pays ».
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Sur la crise post-électorale et la violation de l’état de droit au Gabon
La résolution relève que « l’une des caractéristiques d’une démocratie est le respect de la Constitution, sur laquelle se fondent l’État, les institutions et l’état de droit ; que la tenue d’élections pacifiques, crédibles et transparentes au Gabon aurait largement contribué à relever le défi du progrès démocratique et de l’alternance du pouvoir auquel la région d’Afrique centrale est confrontée ; que les élections législatives au Gabon, initialement prévues pour décembre 2016, ont été reportées deux fois, jusqu’en avril 2018, soit au-delà du délai prévu par la Constitution ».
Les députés européens ont attesté « que les violences postélectorales d’août 2016 ont donné lieu à des arrestations, à des assassinats et à des disparitions forcées, comme l’ont signalé plusieurs instances internationales et organisations non gouvernementales ; que les actes de violence politique se sont multipliés, en particulier dans la capitale, Libreville, où les habitations de plusieurs membres de l’opposition politique auraient été attaquées ». Tout en soulignant « que les autorités s’en sont prises aux représentants de l’opposition et de la société civile qui s’opposent au pouvoir en place ; que les groupes de défense des droits de l’homme font continuellement état de l’aggravation de la situation en ce qui concerne les droits de l’homme et la liberté d’expression et de réunion, comme le recours excessif à la force contre des manifestants pacifiques, les arrestations et détentions arbitraires et les procès répondant à des motivations politiques ».
La résolution considère que, « selon de nombreuses allégations qui ont précédé et suivi l’élection de 2016, le régime du président Ali Bongo serait lié aux violations des droits de l’homme, comme les arrestations arbitraires, les détentions de longue durée dans des conditions inhumaines, les actes de torture, les exécutions extrajudiciaires et les disparitions forcées de civils et de journalistes qui ont exprimé leur opposition à son régime ou à sa réélection ». En rappelant que « le Gabon est partie prenante de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, dont il prépare la transposition dans son droit national, et a l’obligation de partager avec les Nations unies les informations relatives aux progrès effectués depuis sa ratification de cette convention, en 2011, et aux événements qui ont suivi l’élection de 2016 ; considérant que le comité des Nations unies sur les disparitions forcées examine actuellement le rapport du Gabon et les progrès que ce pays a réalisés dans la mise en œuvre de la convention ».
Sur la répression après le dialogue politique insatisfaisant
Les députés européens ont considéré « qu’Ali Bongo a ouvert un « dialogue national » dans le cadre des efforts visant à résoudre la crise que sa réélection a déclenchée ; que, selon le Premier ministre, Emmanuel Issoze Ngondet, des représentants de 1 200 organisations de la société civile et d’une cinquantaine de partis politiques ont pris part à ce dialogue ; que Jean Ping et d’autres hauts dirigeants de l’opposition l’ont boycotté. Tout en soulignant que, le 18 août 2017, Jean Ping, candidat à l’élection présidentielle, a appelé la population gabonaise à la désobéissance civile et a demandé que le président soit chassé du pouvoir » ;
Les eurodéputés ont relevé que, « ces dernières semaines, en marge des manifestations pacifiques, mais non autorisées, de soutien à Jean Ping, des dizaines de personnes ont été interpellées et que plusieurs d’entre elles sont toujours détenues ; et que, le 2 septembre 2017, le dirigeant de l’opposition politique et candidat à la présidence, Jean Ping, ainsi que les dirigeants d’une vingtaine de partis de l’opposition, ont été empêchés de quitter le pays, sans que cette interdiction leur eût été communiquée préalablement et alors qu’aucune liste des personnes visées n’a été rendue publique ; considérant que cette mesure a été levée le 8 septembre ».
Le Parlement européen « a considéré que le gouvernement a interdit aux opposants politiques qui contestent la victoire d’Ali Bongo de s’exprimer en public et dans les médias privés ; et que plusieurs personnalités gabonaises de haut rang ont été citées devant des tribunaux français pour leur participation à de graves violations des droits de l’homme et pour leur détention de biens mal acquis ».
Sur la corruption (biens mal acquis) et la légitimité de l’élection d’Ali Bongo
Les eurodéputés ont considéré « qu’à la suite des plaintes déposées par la branche française de Transparency International et par un ressortissant gabonais, la justice française a clôturé une enquête sur des biens gabonais mal acquis investis en France et a répertorié et saisi des biens d’une valeur de 50 à 60 millions d’euros ; que cette enquête a révélé qu’un montant de 1,3 million d’euros a été versé sur un compte bancaire qui a servi à acquérir des biens en France pour la famille Bongo » ;
Le Parlement européen a « considéré que la mission d’observation électorale de l’Union européenne au Gabon, que le gouvernement gabonais avait invitée pour superviser l’élection présidentielle, a conclu, dans son rapport final, au manque de transparence du processus électoral, et en particulier de la consolidation du résultat de l’élection et du mécanisme de recours ; que cette mission a estimé que ces anomalies mettent en doute l’intégrité de cette consolidation et du résultat final de l’élection ».
La résolution appelle aux sanctions ciblées
La résolution « rappelle qu’en vertu de l’accord de Cotonou, le Gabon s’est engagé à respecter les principes de la démocratie, de l’état de droit et du respect des droits de l’homme, parmi lesquels la liberté d’expression et de réunion, l’accès aux médias, la bonne gestion des affaires publiques et la transparence des mandats politiques ; tout en rappelant au Gabon ses obligations et responsabilités en tant qu’État partie à cet accord, notamment la communication d’informations claires et concrètes sur les réformes engagées depuis la ratification, sur les violences postélectorales et sur les mesures prises pour établir la vérité et pour garantir que les responsables de ces actes soient traduits en justice ».
La résolution « souligne le rôle fondamental que joue l’opposition dans une société démocratique ; condamne vivement les pressions et les intimidations dont fait l’objet l’opposition gabonaise ; estime qu’il est inacceptable que plusieurs dirigeants de l’opposition, notamment Jean Ping, candidat à l’élection présidentielle, aient été temporairement empêchés de quitter le territoire ; rappelle que la législation gabonaise ne permet l’application de cette mesure exceptionnelle qu’aux personnes qui font l’objet d’une enquête pénale ; estime par conséquent que cette mesure était arbitraire ».
La résolution « condamne fermement les menaces permanentes, les agressions, le recours à la force ainsi que les restrictions sévères et les intimidations à l’encontre des opposants, des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes au Gabon ; demande aux autorités de respecter le droit de l’opposition à manifester pacifiquement, de libérer immédiatement toutes les personnes encore détenues illégalement, de mettre un terme à tous les actes de harcèlement, d’intimidation et de persécution contre les opposants, et de prendre des mesures concrètes pour garantir la liberté d’expression ».
Le Parlement européen à travers sa résolution« invite instamment le gouvernement du Gabon à procéder à une réforme approfondie et rapide du cadre électoral, en tenant compte des recommandations formulées par la MOE de l’Union européenne, afin de l’améliorer et de le rendre totalement transparent et crédible ; souligne que les autorités gabonaises doivent garantir une coopération pleine et loyale avec tous les acteurs nationaux et internationaux pertinents, afin de veiller à ce que les prochaines élections législatives, qui auraient déjà dû avoir lieu, soient totalement transparentes et crédibles et se déroulent dans un climat de liberté, de démocratie, d’ouverture et de paix ».
Tout « en prenant acte du dialogue politique renforcé en cours entre l’Union européenne et le Gabon, comme le prévoient les dispositions de l’accord de Cotonou ; exhorte toutes les parties concernées à coopérer pleinement et à œuvrer en faveur d’un succès tangible de ce processus ; mais exprime ses réserves quant au degré d’ouverture du dialogue national lancé par le gouvernement gabonais et, par conséquent, à sa crédibilité et à sa pertinence ; relève que Jean Ping et sa « Coalition pour la nouvelle République » ont refusé de prendre part à ce dialogue ».
La résolution« estime que les profondes divisions sociales et politiques qui règnent actuellement au Gabon exigent une réponse politique claire afin de préserver la stabilité du pays, d’accroître la confiance des citoyens gabonais et de donner une légitimité réelle aux institutions ; demande la mise en place d’une enquête internationale, sous l’égide des Nations unies, sur les élections et les exactions qui ont été commises depuis, afin de déterminer la manière de mettre en place un dialogue politique permettant de sortir de la crise, tout en garantissant les droits démocratiques du peuple gabonais ».
Le Parlement européen « demande instamment à la France, en particulier, en raison de ses liens historiques forts avec le Gabon, de peser de tout son poids politique et économique sur le gouvernement gabonais et de jouer un rôle constructif au sein des institutions européennes à cet égard ; demande à la délégation de l’Union européenne au Gabon de continuer à suivre attentivement l’évolution de la situation dans ce pays et de s’appuyer sur tous les outils et instruments appropriés, ainsi que sur le dialogue politique renforcé, pour assurer le respect des éléments essentiels de l’accord de Cotonou et pour soutenir les mouvements pro-démocratiques ».
La résolution « invite la Vice Présidente/Haut Représente, la Commission et les États membres à réexaminer leurs politiques à l’égard du Gabon et à envisager des sanctions ciblées à l’encontre des responsables de la fraude électorale et des actes de violence qui en ont découlé ; réitère son appel au gouvernement gabonais pour qu’il mette en place un système judiciaire et un régime de sanctions qui garantissent que les arrestations et les condamnations soient proportionnelles à la gravité des délits ; avant d’exhorter le gouvernement gabonais à apporter une réponse concrète aux inquiétudes de la communauté internationale, en organisant rapidement un forum consultatif pour un dialogue réellement ouvert à tous, transparent et impartial ; demande également à l’opposition d’évaluer la crédibilité de ce processus ».
Le Parlement européen « invite tous les acteurs politiques à faire preuve de responsabilité et de retenue, et notamment à s’abstenir de toute incitation à la violence ; invite les participants au prochain sommet UE-Afrique, qui se tiendra à Abidjan, à inscrire la situation au Gabon à l’ordre du jour de la rencontre et à rappeler au Gabon ses engagements en faveur du respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’état de droit ; se félicite de l’enquête menée en France sur les biens mal acquis du Gabon est exprime l’espoir que toutes les personnes impliquées dans des activités illicites soient traduites en justice ; demande que la plus grande transparence soit faite autour du versement de 1,3 million d’euros sur un compte bancaire français lié à la famille Bongo ».
L’assemblée parlementaire européenne « charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, à l’Union africaine, au président et au Parlement de la République gabonaise, au secrétaire général des Nations unies, au Conseil des droits de l’homme des Nations unies ainsi qu’à l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE ».
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